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ON A ROULE AVEC FLORENT

MAILLOT CHAMPION DE FRANCE SUR LES EPAULES, FLORENT BRARD NOUS INVITE A DECOUVRIR SA TERRE D'ADOPTION : LE BEARN, PLANTE ENTRE LES VIGNES DU JURANCON ET LES COLS MYTHIQUES DU TOUR DE FRANCE.
 

 

Interview de Florent, réalisé fin décembre 2006 -- Paru en février 2007 par "VeloMag - par Ch.Osmont

 

   RENCONTRE DU JOURNALISTE ET DU SPORTIF !

-- Florent -- " Quel dommage, aujourd'hui le temps est couvert, on ne verra pas la montagne ! Quand je me lève le matin, si j'ai de la chance, je vois les Pyrénées en face. Pour moi, la montagne c'est les vacances, alors ici j'ai l'impression d'être tous les jours en vacances ! "

-- C.Osmont -- Tu habites depuis longtemps à Serres-Castet ?

-- Florent -- " Depuis  janvier dernier. Je voulais déménager pour avoir de meilleures conditions climatiques pour m'entraîner..... J'aurais pu aller près d'Aix-en-Provence,  dans le Luberon, mais, en fait, je suis un mec de l'Ouest, j'aime le vert. Voilà Patrick Provence, un jeune coureur du coin qui roule souvent avec nous, la bande de pros paloise. On va partir en voiture pour rejoindre un petit parcours sympa sur les coteaux

du Jurançon, et c'est lui ensuite pour qui conduira pour nous accompagner.

Allez, c'est parti !

En voiture, Florent, très voluble dès le matin, explique son quotidien

dans le Béarn."

 

 

  ET C'EST PARTI .... POUR L'ENTRAÎMENT !

-- Florent --  " Voici le point de rendez-vous avec les autres. On vient tous de

directions différentes et on se retrouve ici. Il y a deux rond-points qui se

suivent, on tourne entre les deux pour ne pas se refroidir quand on attend."

-- C.Osmont --  En fait, tu es venu ici rejoindre ta bande de potes ?

-- Florent --  " Oui, c'est ça. Avant, je roulais tout le temps seul. A Pau, c'est

différent, on est nombreux. Christophe Agnolutto, Stéphane Bregès,

Nicolas Portal, Stéphane Augé et Maryan Hary. Quand on s'entraîne, on p

rend vraiment du plaisir, on se tire un peu la bourre pour déconner. On ne

fait plus de cyclisme, on fait du vélo !  Depuis longtemps, je m'entends

super bien avec " Momo " (Agnolutto) et " Bâton (Bergès). Ils ont fait pour

que je les rejoigne ici. Fin 2005, Bâton m'a trouvé ma maison, Momo m'a

emmené la visiter, et c'était fait...... Ca y est, on est à Monien, on descend

de voiture. Il y a un critérium d'après-Tour ici. Et c'est autour de Monien que 

sont concentrées la plupart des vignes du Jurançon. Au fait, j'ai fait les

vendanges cette année. C'est excellent, les vendanges !

En plus, moi, j'aime beaucoup le vin. Je suis de Touraine, une région de vin tout de même.

Tu est prêt ? On y va ! On va faire un de mes circuits préférés. C'est uniquement de la bonne route et, quand il fait beau, c'est magnifique, mais c'est moins bien aujourd'hui parce qu'on ne voit pas les montagnes. Sur ce parcours, il y a quelques bosses sympas. En plus, je vais t'emmener monter une petite " redoute ", une côte que j'appelle comme ça parce qu'elle est un peu semblable à la vraie, celle de Liège-Bastogne-Liège., avec des passages à 20%."

-- C.Osmont -- Joli programme !

-- Florent -- " Ce parcours, je le fais souvent à bloc. Je vais jusqu'à Oloron-Sainte-Marie, et je reviens sur le coteau qui est en face. Sur cent bornes, ça me fait milles mètres de dénivelé et, le but du jeu, c'est de faire ente 33 et 34 kilomètres à l'heure de moyenne avec une cadence de pédalage supérieure à 90 tours par minute. Aujourd'hui, c'est le même, mais en plus court puisqu'on est venu en voiture jusqu'ici."

 

 

  SYDNEY HAYOUN

-- C.Osmont --  Qui te prépare tes entraînements ?

-- Florent --  " Sydney Hayoun. Il est ostéopathe et à un cabinet à Pau. Ce que je recherche dans une relation entraîneur-entraîné, c'est la confiance. Alors, quand je suis arrivé dans la région, j'ai demandé à Sydney, que je connaissais depuis dix ans et qui est un ami aujourd'hui, de s'occuper de mes entraînements. C'est lui qui m'a permis de régler les problèmes de dos dont je souffrais depuis ma chute au Midi Libre en 2002. L'avantage de travailler avec lui, c'est qu'il habite Pau. Souvent, les entraîneurs habitent à cinq cents bornes du coureur et ils ne communiquent que par internet. Là, c'est du concret. Je vais le voir une fois par semaine, non seulement pour l'entraînement, mais aussi pour la gestion de toute ma vie de coursier. On discute, on établie le programme...."

 

  BLEU-BLANC-ROUGE

-- C.Osmont -- Tu mets tous les jours ton maillot de Champion de France ?

-- Florent --  " Oui, c'est mon petit plaisir du matin ! Je ne l'ai que jusqu'au mois de juin, alors j'en profite. Le problème, c'est qu'on est fin décembre et que l'équipe ne m'a toujours pas envoyé les fringues d'hiver. Aujourd'hui, par 3°C, même avec plusieurs maillots en dessous, je me les gèle ! "

 

  LA CAISSE D'EPARGNE-ILES BALEARS ?

-- C.Osmont -- A part ce problème, tu te plais à la Caisse d'Epargne ?

-- Florent -- " Je suis tombé sur une superéquipe ! J'ai adoré Festina, mais, là, c'est vraiment l'équilibre qui me convient parfaitement. C'est une approche du vélo différente de celle qu'on a en France. C'est la griffe Echavarri. Il part du principe qu'on ne peut pas marcher toute l'année, alors il laisse ses coureurs se préparer tranquillement pour être présent le jour J. Il a des gosses d'ambitions, mais pas cinquante mille : le Tour, la Vuelta et les classiques ardennaises. Alors qu'une équipe française veut que ces coureurs soient bien tout le temps."

-- C.Osmont --  Cette année, les dirigeants te demandaient uniquement d'être prêt pour aider Valverde sur le Tour de France, c'est ça ?

-- Florent -- " Voilà, il n'y avait que ça d'important. Du coup, alors que je recommançais à peine à " marchouiller " au Romandie et à Dunkerque au mois de mai, après un an à traîner une toxoplasmose et une mononucléose, ils m'ont dit : " Stop, maintenant, tu prépares le Tour. L'important, c'est d'être bien en troisième semaine. Donc tu restes chez toi et tu t'entraînes tranquille ". Moi et Portal, on n'était pas habitué à ça. On a repris au Dauphiné après quatre semaines sans courir. On a fini complètement cramés ! Mais, dès la semaine d'après, au Gp d'Einhoven, le contre-la-montre par équipe, on sentait que la forme revenait."

 

  RETOUR SUR LE PASSE !

-- C.Osmont --  Quand tu as gagné le titre de Champion de France quelques jours plus tard, tu as dit que tu avais connu beaucoup de bas, et que c'était ce qui faisait apprécier les hauts....

-- Florent -- " Oui et, de toute façon, je n'ai jamais voulu refaire le passé. Si on me demandait si je voulais changer quelque chose de mon parcours, je dirais non."

-- C.Osmont --  Tu as quand même fait une erreur en 2002 qui a abouti à ton contrôle positif aux corticoïdes sur le Tour de l'Ain.

--- Florent -- " On ne peut même pas considérer ça comme une erreur. J'avais une autorisation pour prendre ces médicaments, et le seul problème c'est que ça n'a pas été signalé dans mon carnet. Mais ce fameux carnet, il était resté dans le sac de pluie au service du Crédit Agricole depuis ma chute au Midi Libre. Et moi, quand j'étais dans mon lit à l'hôpital, j'étais tout sauf un coureur. Je ne pensais même pas au vélo, alors me soucier d'un carnet..... De toute façon, j'étais dans mon droit puisque j'ai gagné mon procès contre l'équipe du Crédit Agricole qui m'avait licencé."

-- C.Osmont -- Tu en veux encore à R.Legeay ?

-- Florent -- " Non, c'est lui qui m'en veux. Il m'a encore renvoyé en cassation. Mais, jusqu'à présent, j'ai gagné tous les procès. Si je ne suis pas dans une équipe française, c'est un peu à cause de lui. Il y a deux ans, alors qu'il savait que j'étais en contact avec Agritubel, il a dit à l'assemblée de l'AC 2000 (qu'il présidait à l'époque). " Si une équipe française embauche un ex-dopé, on l'exclut de l'assocation ! " Mais Agritubel lui a tenu tête. Moi, je m'en fous, je suis un peu tête de con, j'aime bien la confrontation."

-- C.Osmont -- Contrairement à lui, tu ne considères donc pas comme un ex-dopé ?

-- Florent -- " Non, c'est l'image qu'on a tenté de me coller. Prendre des médicaments pour soigner un mal de dos terrible et finir à 35 minutes des premiers, ce n'est pas du dopage. Mais tout ça m'a aussi permis de me construire. De toute façon, je suis dans la vie comme sur le vélo, j'aime les difficultés. Nous, les cyclistes, on est tous un peu comme ça : au départ d'une cyclo toute plate, il y a cent coureurs, alors que quand il y a 5000 mètres de dénivelé, ils sont 8000. Et sur les 8000, après la course, 6000 se disent : " Plus jamais je ne referai ça ! ". Pourtant, trois jours plus tard, c'est plutôt : " On repart où l'année prochaine pour l'étape du tour ? " 

 

 

   RETOUR SUR LE SUJET DE L'ENTRAÎNEMENT

-- C.Osmont --  D'ailleurs, ça monte quand même ici !

-- Florent --  " On est bientôt en haut, mais ce n'est qu'un apéritif ! Nous arrivons à Oloron, aux portes de Marie-Blanque,du Somport... Le Tour de France passe souvent par là."

-- C.Osmont --  Tu vas régulièrement t'entraîner dans les cols des Pyrénées depuis que tu habites ici  ?

-- Florent -- " Bien sûr ! J'ai une petite préférence pour l'Aubisque, côté Gourette. Pour s'entraîner, c'est le top. Ce n'est pas comme dans Marie-Blanque ou t'es arrêté ! La plupart du temps, les cols, je les monte seul. J'ai souvent des petits exercices à faire et puis je me chronomètre toujours. Je note mes temps et ça me fait des repères."

-- C.Osmont -- Tu ne fais plus jamais de piste ? Tu étais pourtant un bon pistard avant : multiple champion de France de poursuite chez les jeunes, vanqueur des Six Jours de Grenoble amateurs.

-- Florent --  " En ce qui concerne les Six Jours, j'en avais marre de prendre à chaque fois une gamelle dès le premier

soir ! Les premiers que j'ai faits, c'était avec Jérôme Neuville. Je me suis cassé la clavicule au bout de cinq minutes.

Je lui passais le relais, et lui, il était tellement fort qu'en poussant, il m'a fait passer de 50 à 20 à l'heure, je suis tombé

et ma clavicule était en trois morceaux. Après, à chaque fois, je tombais et je devais continer tout croûté. Pas facile......"

-- C.Osmont --  Mais tu pourrais rouler sur piste uniquement pour t'entraîner.

-- Florent -- " Je n'ai pas de piste à proximité et puis, surtout, je préfère la route. La piste m'a beaucoup apporté, mais

ma passion, c'est la route. J'ai aussi adoré le cyclo-cross. Quand j'ai commencé le vélo, c'était pour ça. Mais j'ai vite

compris que c'était pas pour moi, je ne suis pas assez explosif."

-- C.Osmont --  Tu as touché à tout ! On sent que tu as une vraie culture du vélo.

-- Florent -- " J'ai baigné dans le vélo depuis ma naissance. Mon père est un véritable cinglé de vélo. Il fait collection

des magazines de cyclisme. Il a tout en double : un exemple pour consulter - et encore, on n'a pas le droit d'y toucher

sans sa permission - et un exemplaire encore emballé pour ne pas l'abîmer ! Avant de faire le Tour des Flandres, par

exemple, il m'avait tellement abreuvé d'anecdotes que je connaissais les noms de tous les monts. Le Tour  des Flandres,

d'ailleurs, je l'ai couru pour la première fois l'année dernière seulement. En haut du koppenberg, j'ai fait un signe au

public pour qu'il nous encourage encore plus.  On m'a peut-être pris pour un charlot, mais je trouvais l'ambiance

tellement bonne que je voulais participer à la fête ! Oui, j'ai un véritable amour du cyclisme qui ne s'arrête pas à

la pratique. Quand je descends de vélo, je redeviens un spectateur passionné. Je regarde parfois avec des copains

des classiques à la télé. Quand un coureur que j'aime bien est devant dans le final, je suis à moins d'un mètre de l'écran,

le bide retourné... La dernière fois que ça m'est arrivé, c'était chez Momo avec Bergès et Portal pour le Championnat de France de Cyclo cross 2006. A l'arrivée, en haut de la bosse, quand Gadret dépasse Mourey, quel effort extrême, quel moment de télé ! Je trouve ça trop beau des trucs comme ça !  Ca me réconcilie avec le cyclisme...."

 

  SES POTES !!

-- Florent --  " Là, nous arrivons à Lasseube. On est bientôt sur le circuit de la Randonnée Christophe Agnolutto. On y passe tout le temps à l'entraînement, mais maintenant, on se recueille à chaque fois, en hommage à l'ex-professionnel qu'il est depuis le 1er janvier ! "

-- C.Osmont -- Agnolutto arrête sa carrière, Bergès repârt en amateur, tu vas te retrouver un peu seul sur les routes ?

-- Florent -- " Ah, je leur ai dit que je m'ennuierai sans eux. En plus un autre de mes meilleurs copains, Nicolas Fritsch, se retrouve également sans contrat et reprend en amateurs à Aix."

-- C.Osmont -- Une énigme, ce coureur ....

-- Florent -- " Il a simplement un problème d'équilibre. Un jour, il est tombé et s'est tapé la tête. Depuis, il a du mal dans les descentes et les pelotons. Ce genre de problème se résout, mais je crains qu'il soit trop tard. Pourtant, je pense qu'il n'y a pas un sportif en France qui s'entraîne plus que lui.  Il passe son temps sur levélo, et pas à 30 à l'heure !  C'est le seul que je connais qui a monté le Mont Ventoux des trois côtés à la suite. Le premier en roulant une minute à bloc, quatre minutes au tempo, le deuxième au seuil et le troisième grand plateau. Après il était content.....

On arrive dans le vallonné à présent, vraiment sur les coteaux du Jurançon. En ce moment, c'est la taille."

 

  LA REGION

-- C.Osmont -- Tu t'intéresses de près à la vie de la région où tu as choisi d'habiter !

-- Florent --  " Pour moi, le vélo est un des meilleurs moyens de faire du tourisme. J'aime bien m'imprégner des choses

du coin. Depuis que j'habite ici, je ne mange presque que du canard et je ne bois que du jurançon, comme je mangeais

de la cancouillotte et buvais de l'arbois ou des côtes-du-jura quand j'habitais Lure."

-- C.Osmont -- Si tu as fait tant de critériums cette année, c'est aussi pour découvrir les régions ?

-- Florent -- " J'ai respecté la tradition du Champion de france dans les critériums. Et puis, c'est toujours bon de gagner

des sous avec les petits contrats, il ne faut pas l'oublier. Mais surtout, j'aime bien le contact, j'aime faire partager ma

passion. Faire un critérium, ce n'est pas seulement faire du vélo : c'est rencontrer les gens, les partenaires, ......

Ceux qui viennent voir les critériums sont de vrais amoureux du vélo. Et tu es toujours superbien reçu par les

organisateurs. Cette année, j'ai été intronisé dans la confrérie de la fraise de Vergt, en Dordogne : on m'a fait manger des fraises dans une coupe pleine de Monbazillac. Je trouve ça excellent, ce côté culture régionale !

Bon , allez, là on prend à gauche. C'est le redoute, la côte dont je t'ai parlé. Interdit de mettre pied à terre ! "

.... Un peu plus tard, en haut, une fois les esprits retrouvés..

-- C.Osmont --  C'est marrant, toi, le rouleur, tu parles tout le temps de bosses et de col.

-- Florent -- " Ca fait cinq ans que j'essaie de bien monter les cols parce que c'est ce que j'aime par-dessus tout. Mais, en fait, je ne serai jamais un grand grimpeur, je monte tout le temps assis ! Je m'obstine à essayer de grimper, alors que, dans le cyclisme actuel, il faut être très bon dans une spécialité. Alors, cette année, je vais essayé de refaire de bons chronos. C'est tout de même dans cet exercice que je m'exprime le mieux. Je vais plus rouler avec mon vélo de contre-la-montre. L'année où j'avais bossé spécifiquement le chrono, en 2001, avec frédéric Grappe, ç'avait marché puisque j'avais été champion de France de la spécialité !

Allez, on redescend vers Pau. Au fait je ne t'ai pas parlé du VC Pau Béarn, le club dans lequel je suis licencié, qui a été créé l'année dernière. Ce n'est pas bien, je ne fais pas bien mon boulot ! Mais c'est vrai que je suis bavard......"

-- C.Osmont -- C'est sûr, on n'a pas vu le temps passer. Il faudra que je revienne pour que tu me raconte le reste.

 

  FIN.

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